Dans les articles phares du CRBLM, nous soulignons le travail actuel et en cours de nos membres sur divers sujets. Les publications “Connexions recherche / applications concrètes” se concentrent sur un seul article publié, donnant un très court résumé et mettant en évidence des applications potentielles à des questions de politique réelles.
Connexions recherche / applications concrètes : Politiques linguistiques officielles et familiales au Québec
Article de blog par Mehrgol Tiv
Traduction par Audrey Delcenserie
Référence: Ballinger, S., Brouillard, M., Ahooja. A., Polka, L., Kircher, R., et Byers-Heinlein, K. (2020). Intersections of official and family language policy in Quebec. Journal of Multilingual and Multicultural Development. https://doi.org/10.1080/01434632.2020.1752699 Pré-impression : https://psyarxiv.com/bjxm8/
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Comment les parents élèvent-ils leurs enfants avec plus d’une langue à Montréal, Québec ? Grâce à une série d’entrevues, des chercheurs de l’Université McGill, de l’Université Concordia, de la Fryske Akademy et du Centre de recherche sur le cerveau, le langage et la musique ont découvert que certaines pratiques et croyances linguistiques des ménages s’alignent sur les politiques linguistiques du Québec alors que d’autres en diffèrent.
Depuis les années 1970, le français est la seule langue officiellement reconnue dans les écoles publiques, les institutions gouvernementales et les milieux de travail au Québec. Cette culture a été soutenue par une série de politiques linguistiques provinciales qui visent à préserver le statut du français par rapport à l’anglais et aux autres langues. La plupart des familles avec enfants subissent l’impact quotidien de ces politiques par le biais du système éducatif, puisque la majorité des élèves québécois vont à l’école en français et que les possibilités d’éducation en anglais, bilingue ou dans une autre langue sont limitées.
Dans cette étude, certaines pratiques linguistiques à la maison s’alignaient sur ces politiques de langues officielles, notamment la préférence pour l’apprentissage formel du français à l’école et l’apprentissage informel de l’anglais par le biais des médias. De nombreux parents ont suggéré que l’anglais était plus facile à apprendre de manière informelle en raison de sa prévalence sur Internet et dans les médias, contrairement au français. De la même manière, les parents ont reconnu et apprécié l’importance d’une solide compétence en français dans la société québécoise.
D’autres pratiques relatives à la langue parlée à la maison différaient des politiques relatives aux langues officielles, notamment les croyances positives sur la valeur du bilinguisme. Tous les parents croyaient que l’apprentissage de plus d’une langue serait bénéfique pour l’enfant. Les parents qui parlent une langue autre que l’anglais ou le français à la maison s’intéressent particulièrement aux possibilités plus formelles d’éducation bilingue, aux ressources parentales bilingues et aux communautés bilingues. Bon nombre de ces parents ont mentionné les défis que représente le fait d’être le seul responsable de la transmission de leur langue maternelle à leur enfant, en l’absence de nombreux systèmes de soutien officiels. D’autres ont indiqué qu’ils souhaitaient un accès plus large au matériel d’apprentissage, notamment aux livres pour enfants, et des communautés de soutien pour discuter des meilleures pratiques pour élever leur enfant dans plus d’une langue.
Cet article a des implications claires pour les politiques linguistiques du Québec, dont certaines pourraient bientôt changer avec la proposition du projet de loi 96 du Québec et le nouveau plan d’action de la ville de Montréal pour la promotion de la culture et de la langue françaises. Par exemple, les résultats suggèrent que de nombreuses familles sont en faveur d’une législation visant à étendre les systèmes d’éducation formelle à des langues autres que l’anglais et le français, y compris davantage de programmes d’éducation bilingue. Les conclusions de cet article sont également directement pertinentes pour les éducateurs. Les résultats indiquent que si l’inclusion des langues parlées à la maison dans les écoles et les contextes éducatifs peut aider les familles à conserver leurs traditions linguistiques et culturelles, une exposition à des langues plus diverses à l’école peut également favoriser de meilleurs résultats scolaires pour les élèves. Enfin, ces résultats sont pertinents pour les dirigeants communautaires, les entreprises et les autres institutions locales. Selon les résultats, les parents d’enfants bilingues souhaitent que davantage d’événements communautaires soient organisés en anglais et en français. De plus, les parents veulent plus de ressources pour élever leurs enfants bilingues. Les communautés et les institutions locales peuvent mener ce changement en invitant des spécialistes des langues et d’autres experts à discuter ouvertement de ces pratiques.